La Métropole de Lyon est l’autorité organisatrice du service public d’eau potable. Le Conseil de la Métropole des 13 et 14 décembre 2020 a fait le choix d’une gestion en régie dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Le 21 juin 2021, il avait pris acte des propositions faites sur l’organisation et la structuration du service public de l’eau potable. Lors de sa séance de décembre 2021 il vient de décider la création, au 1er janvier 2022, de la Régie publique de l’eau potable. Cela met fin à une suite de contrats de délégation de la gestion au privé trop longtemps au seul bénéfice de leurs actionnaires.
Depuis des années, les écologistes et la gauche, le collectif « Eau bien commun » demandaient ce retour complet à une gestion directe et la fin de la délégation au privé. Il faut dire que le contrat initial, très et trop long (30 ans) était qualifié à juste titre de léonin tant tous les avantages étaient au bénéfice des actionnaires. Non respect des travaux d’entretien nécessaires, taux de fuites importants, absence de vision à long terme sur la ressource, bénéfices réalisés sur le placement des prélèvements avant relevé toujours supérieurs au réel, surfacturation des charges de structure de gestion, abonnements inadaptés, absence de contrôle réel de la gestion, … Tout allait dans le même sens.
Déjà après 2001, des négociations ont permis de faire baisser de façon significative le prix aux usagers et de commencer à mieux connaître le réseau mais les indemnités de ruptures de contrat étaient trop élevées et il n’y avait pas de majorité pour le faire au Grand Lyon.
Après 2008, la pression des Verts, du GAEC et du PCF ont permis de recréer une équipe compétente dans les services, de créer une autorité de contrôle, de rassembler toutes les données de connaissance des réseaux, de rattraper des retards dans les travaux, d’obliger à créer une filiale spécifique avec une comptabilité propre, bref de réunir toutes les conditions du retour en régie pour qu’il n’y ait plus de prétextes à le refuser. Grenoble, Paris ont aussi suivi ce chemin comme d’autres villes et ont contribué à le crédibiliser.
Aujourd’hui la Métropole vient enfin de décider ce retour en gestion publique complète et on ne peut que s’en réjouir tant les enjeux sont importants et vitaux.
Cette régie publique de l’eau, va assurer notamment, les missions suivantes :
- Contribuer à la gestion et à la préservation de la ressource en eau,
- Gérer la production, le traitement, le transport, le stockage et la distribution de l’eau potable,
- Assurer la surveillance de la qualité de l’eau et la réalisation des traitements nécessaires,
- Sécuriser l’approvisionnement en eau potable, la diversification des sources d’approvisionnement, la gestion des interconnexions de secours,
- Gérer l’achat et la vente d’eau nécessaires à distribution de l’eau potable,
- Garantir la maintenance, l’entretien et le renouvellement de l’ensemble des biens affectés au service remis par la Métropole à la Régie ou acquis ou réalisés par cette dernière,
- Planifier la conception, le financement et la réalisation des nouveaux investissements,
- Renforcer l’information et la sensibilisation des usagers aux enjeux de gestion de la ressource en eau,
- Gérer la relation avec les usagers et les abonnés, incluant la facturation et le recouvrement du prix de l’eau potable ainsi que des taxes et redevances pour le compte de tiers,
- Développer les activités de recherche indispensables aux missions précédentes.
- Contribuer à mettre en œuvre des mesures sociales visant à rendre effectif le droit d’accéder à l’eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous.
La régie publique du service de l’eau sera opérationnelle le 1er janvier 2023. La régie, grâce à son statut d’établissement public à autonomie financière et personnalité morale, permettra de faire participer des associations d’usagers, des associations environnementales ainsi que des représentants du personnel à son conseil d’administration. Ces associations et représentants disposeront de voix délibératives et pourront ainsi directement peser sur les orientations stratégiques de la régie. Pour la première fois en France, sur les 20 membres du Conseil d’administration de la future régie, quatre seront des représentants des usagers.
La Métropole a défini un cadre stratégique notamment à travers un schéma général avec :
- la stratégie de sécurisation de l’approvisionnement en eau potable et en eau brute,
- la trajectoire financière et tarifaire du service
- les orientations à long terme en matière d’investissement,
- l’articulation de la politique publique de l’eau avec les politiques publiques métropolitaines.
Ce cadre stratégique fixe le cap de la politique de l’eau potable de la Métropole à l’horizon 2035, en prenant en compte les enjeux sociaux et environnementaux.
Ce cadre permet de préciser les objectifs et le fonctionnement de la future régie publique de l’eau autour de six axes :
- AGIR pour la préservation des ressources en eau potable
- SÉCURISER le système d’alimentation en eau potable à long terme et face aux crises
- RAPPROCHER le service de ses usagers
- GÉRER le patrimoine de façon performante et durable
- RECHERCHER l’amélioration continue des performances du service
- RENFORCER la cohérence des politiques publiques liées à l’eau potable
- PROTEGER la qualité des eaux.
Nous défendons depuis longtemps une gestion publique de ce bien commun pour répondre aux enjeux climatiques, sociaux et environnementaux. L’eau est un bien commun. Il est non exclusif – chacun doit avoir accès à une eau de qualité à un tarif accessible.
Cette gestion doit se faire dans le sens de l’intérêt général. Il est donc désormais impératif de porter une vision à long terme et une gestion durable de l’eau qui appelle un engagement fort de l’autorité organisatrice du service public de l’eau qu’est la Métropole.
L’eau est au cœur des enjeux de notre époque, écologiques, démocratiques et sociaux. Elle est en effet au carrefour des préoccupations : raréfaction de la ressource, risques de conflits d’usage, pollution par les micropolluants, difficultés d’accès à l’eau pour certains de nos concitoyens.
Pour trop de personnes fragiles, l’accès à l’eau est techniquement réel mais aussi financièrement trop souvent très difficile voire insupportable. Il faudra donc plus de justice dans l’accès à l’eau. La production et l’exploitation d’eau potable se doivent de répondre aux attentes des usagers et de prendre en compte, non seulement la dimension environnementale, mais également la dimension sociale. Tous les habitants doivent avoir accès à une eau de qualité. Pour cela, la Métropole s’engage à prendre des mesures pour que l’eau potable soit réellement accessible à tous à un prix soutenable à long terme avec une tarification juste et équitable. A la fin de l’année 2022, une concertation sera mise en place afin de réfléchir à l’instauration d’une tarification sociale et environnementale favorisant les plus petits consommateurs aux revenus modestes et pénalisant, a contrario, les plus gros consommateurs.
Sécuriser l’alimentation en eau potable passe bien sûr par l’optimisation et la préservation des ressources existantes (champ captant de Crépieux-Charmy en particulier) mais aussi par la recherche de nouvelles ressources pour faire face à la crise climatique. Cette politique passera notamment par une politique d’acquisition foncière dans les aires d’alimentation des captages d’eau potable, mais aussi par des actions de sensibilisation et de formation des agriculteurs aux effets de l’utilisation des pesticides dans les aires d’alimentation des captages avec la mise en place d’un accompagnement des agriculteurs dans le passage au bio et par la préemption de terrains agricoles situés à proximité des champs captants.
Maintenant il faudra continuer à être vigilants dans la mise en œuvre, la concrétisation et l’évaluation partagée de cette nouvelle politique de l’eau.
Yves Fournel
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