Distanciation sociale ou distance physique ?

29 Avr, 2020

Avec le Covid-19 et les gestes barrières, une nouvelle expression est apparue, celle de distanciation sociale. Mais pourquoi employer le mot « social » quand on parle d’une distance physique à respecter pour se protéger du virus ?

Le mot distanciation, n’est déjà pas le bon, car c’est la création d’une distance entre soi et la réalité. Le mot « distance » eut été préféré, car plus exact et plus simple.

Le mot social, quant à lui, est employé à contre sens car il se rapporte à une société, à une collectivité humaine ; il s’intéresse aux rapports entre un individu et les autres membres de la collectivité.

Quand on pense au mot social, on pense au « dialogue social » signifiant l’échange, à « l’assistance sociale » qui est là pour aider les plus faibles, aux « réseaux sociaux » qui sont là pour rapprocher les gens. Le mot social va à l’encontre de celui de la distance.

Mais le mot social nous fait penser aussi aux « catégories sociales » qui segmentent notre société en différentes couches et cela évoque la différence. La distanciation sociale peut être prise dans ce sens-là ; c’est-à-dire s’éloigner des gens qui ne font pas partie de notre catégorie sociale. Nous n’avons surtout pas besoin que cette expression fasse penser à ça, d’autant que nous voyons monter depuis déjà plusieurs années le repli sur soi, le rejet de l’autre, les extrémismes. La crise sanitaire qui sera indiscutablement suivie par une crise économique ne va qu’aggraver les choses.

Le mot social peut donc selon le contexte vouloir dire « rapprocher les gens », mais aussi « séparer les gens », mais en aucun cas il s’agit de distance physique.

Avec la crise, pour se protéger, on s’écarte quand on croise quelqu’un. Certains le font accompagné d’un sourire ou d’un geste pour dire que c’est juste le virus qu’on ne veut pas voir ; d’autres se croisent la tête baissée pour ne pas voir l’autre, le possible coupable.

Comme le souligne Martin W Bauer, professeur de psychologie sociale à la London School of Economics
« En ces temps étranges de pandémie, nous voulons une distance physique claire, mais en même temps, nous voulons que les gens restent proches les uns des autres “socialement” ».

Gardons nos distances physiques, mais plus que jamais communiquons, échangeons, rapprochons-nous des autres. Augmentons la distance physique, mais diminuons la distance sociale.


Jacques VESCO

 

 

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